Ma mère. Le portrait de l'émancipation d'une femme.

Ma mère. Le portrait de l'émancipation d'une femme.

MA MÈRE. LE PORTRAIT DE L’ÉMANCIPATION D’UNE FEMME.

J’aime m’arrêter sur les quelques portraits que j’ai dessiné de ma mère et lire les rares textes qu’elle avait écrits dans sa jeunesse.

Fusain, 2017

Ce que j’aime le plus, c’est de revoir son écriture, soit sur des fiches de recette ou sur des cartes d’anniversaire, ou cette inscription placée en tête du livre qu’elle m’avait donné.

J’ai retrouvé un essai littéraire qu’elle a écrit dans les années 40. Elle n’avait pas encore 18 ans. Il s’intitule : “Le rôle de la femme dans notre histoire”. Dans cet essai, alors encore jeune fille, elle attribuait aux femmes et aux mères, toute la responsabilité des relations homme/femme et de l’éducation des garçons. À cette époque, les parents, dans une très grande majorité, avaient des rôles traditionnels. Les femmes à la maison et les hommes au travail. De plus, dans les approches psychanalytiques, on tenait la mère comme seule responsable du développement des enfants.

Au moment de la rédaction de son essai, rien ne laissait présager qu’elle deviendrait, 25 ans plus tard, une des premières féministes de sa génération et une syndicaliste très engagée et impliquée dans son milieu de travail.

Mariage et cinq enfants. Monoparentale au début de la trentaine. Intégration au marché du travail. Retour aux études dans la quarantaine tout en travaillant à plein temps. Ma mère ne se comportait jamais en victime. Dans toutes les épreuves de sa vie, elle a pris le taureau par les cornes. Un modèle de force, de persévérance et d’espoir. Elle était une femme avec de grandes valeurs de justice et d’égalité.

Puisque son écriture est difficile à lire, j’ai retranscrit des extraits de son texte à la suite de cette photo.

Elle écrit à 16 ans :

“Nous connaissons les exploits de nos intrépides ancêtres, le zèle de nos prêtres, mais nos mères canadiennes, comme elles sont oubliées! Ce sont des héroïnes […]

Lorsque les Anglais voulurent imposer leurs lois, la femme lutta elle aussi pour la liberté. Car c’est elle qui apprit à ses enfants la beauté de la langue et la grandeur de la religion. Louis-Joseph Papineau n’aurait pas été si grand défenseur de notre cause sans le sentiment patriotique que sa mère lui transmit. Personne n’est plus dévouée que la mère […]

Aujourd’hui, les écoles de réformes regorgent de jeunes délinquants. De plus, l’homme respecte moins la femme qu’autrefois. La faute doit être attribuée à la mère de famille qui n’a su donner à ses fils des manières élégantes et un sentiment de vénération et d’amour véritable pour la femme, c’est-à-dire l’aimer non pour son physique attirant mais pour son coeur débordant de vertus et pour sa mission sacrée que personne ne doit ternir.

C’est à nous, mamans canadiennes de demain, qui incombera le devoir de réformer la société, de préparer les enfants à accomplir leur vocation sans défaillance qu’elle soit la religion, la profession ou la politique. Préparons-nous dès aujourd’hui pour être en mesure de dire à Dieu lorsqu’il désignera notre mission : “Je suis prête.”

Pour terminer, elle a écrit ailleurs dans son journal : “Oh merci, mon Dieu, de m’avoir donné une sainte maman pour pourvoir devenir, plus tard moi aussi, une autre sainte maman”.

Oui, maman, tu as été une mère merveilleuse. Je pense à toi. Merci de me visiter souvent dans mes rêves!

Ta fille, Nicole.

Tags: pensée émancipation portrait féministe rôle des mères

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